Tout passe

Rien d’autre à faire que

D’attendre

Tout passe

Tout se meut

Tout passe comme un miroir sans fin dont on aurait brisé la vitre

Tout passe, le miroir comme le couteau

La plume et le flambeau

Tout passe

Rien d’autre à faire que d’attendre

Que ça passe

Les signaux, le coup de grâce

L’impact livide, l’obus placide

Tout passe et je me le répète sans cesse

Alors sans cesse je me répète de ne pas me le répéter

Tout passe, les idées fixes et les pensées gelées

Les pensées azimutées, mutantes de paradoxes

Tout et son contraire

Tout et l’adultère

Trahir soi-même ses propres pensées

Ce ne sont que des pensées

Attendre

Comme assis sur un banc pour que se déroule l’histoire

Spectatrice de ma vie, actrice de ma vie

Attendre, patiemment, longuement, sans équivoques

Attendre que ce décode le code en morse

Tout seul

Que trépasse ce linceul

L’ouvrir en grand

Avec rien dedans

Tout passe

Comme mon corps enfermé dans son passé

Mémoires corporelles ancrées

Si profondément ancrées

Tout a une explication

Tout a un sens

Qu’il faut oublier

Je jette ma tête sur cet oreiller

320 fois par jour pour me reposer

Oublier

Laisser faire

Laisser passer

Et puis finalement

Tout ne passe pas tout seul

Il faut encore agir

Sortir de chez moi

Regarder le dehors qui s’agite sans m’agiter moi-même

Ecrire ces putains de poèmes

Filtrer mes putains de problèmes

Retourner mille fois là où j’ai oublié mille adresses

Retourner mille fois dans mon passé comme si je m’étais plantée d’adresse

C’est le coeur qui sait tout

C’est le coeur qui a la solution

C’est le coeur qui se trahit tout seul

C’est le coeur qui n’a qu’une seule passion

Recommencer

Car demain il y aura encore l’aurore

Et d’autres pâques et d’autres noël et d’autres années et

D’autres denrées rares

Les amis

Sont des ennemis intérieurs qu’on avait pas vu arriver

Les ennemis sont des amis intérieurs que l’on voulait enterrer

Tout meurt pour qui ne connait pas son passé

Est condamné à le recommencer

Pour le résoudre

Ça va beaucoup plus vite de décompenser

Ça va beaucoup plus vite de devenir fou

Ça va beaucoup plus vite de connaitre sa douleur

Depuis mille ans déjà que je la trimballe dans ma tête

On dira

Les maladies mentales sont dans la tête

Les maladies mentales sont partout

Dans le coeur, dans l’égo, dans le corps

Et la tête s’évanouit

On dira

Les maladies mentales sont partout

Dans ce monsieur qui râle encore en terrasse

Alors que le monde se meurt

Dans cette dame qui choisit des pamplemousses roses

Alors qu’il n’y a plus d’huile d’olive

Dans l’incohérence des jours

Dans les longs longs discours

Ceux des psychiatres, ceux du président de la République

Quand la République n’est plus là, qu’est-ce qu’on fait ?

On incendie son voisin, on recule avec son chien, on ne pense qu’à sa gueule

Et après on dira

Les fous étaient vraiment trop fous

Les fous sont tout le contraire

Les fous ont une âme trop sensible, et vieille et terroriste

Les fous regardent les bagnoles brûler, la planète exploser

Et avant la fin du monde

Vont boire des cafés en terrasse

Vont boire des cafés chez leur voisine qui devient une amie d’évidence

Refont leur appartement comme si c’était le dernier

Puis recommencent encore pour des maisons dont ils essayent de se foutre éperdument

Pourvu qu’on épargne le printemps

Pourvu qu’on épargne nos ainés

Au lieu d’épargner de l’argent

Pourvu qu’on épargne la folie

De ceux et celles qui avaient envie de vivre

POur celles qui fument des clopes si elles en ont envie

Qui n’ont pas besoin qu’on leur formule 20 fois par jour

Que les fumeurs vont crever

POur le sens de nos évidences

Lave toi les dents, fais du sport, débarrasse la chaussée

Pour le sens de nos évidences

Laissez les fous rêver

 

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Commentaires

Edwige
il y a 3 ans

Très beau poème!

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