On peut tout te prendre

On peut tout te prendre

Mais pas qui tu es

On peut tout te prendre

Mais pas ton âme, ton coeur, ton ventre

On peut tout te prendre

Tant que l’on ne te prend pas la vie, on ne te prend rien

Absolument rien.

S’en vont les objets, les meubles et le frigo, la machine à laver, la cafetière et l’aspirateur

S’en vont les livres, les photos, les souvenirs tels des objets que l’on chérissait

S’en vont les habits, l’écharpe rouge et le foulard gris

S’en vont les lettres des anciens amants, s’en vont ce petit mot griffonné par une amie et celui-là dessiné par un enfant

S’en va celui qui t’aime

S’en va celui que tu aimes

S’en va l’amour dans ta chair

S’en va le vent dans tes cheveux qui te faisait chavirer

Et avec, toute une horde d’instants précieux

Le passé

On peut tout te prendre

Mais pas qui tu es

On peut tout te prendre

Mais pas ton présent

Ton présent qui construira ton futur, sans que tu y prennes garde

On peut tout te prendre

Mais pas tes pieds qui font les 600 pas dans ce couloir

Ou qui marchent dans cette forêt pendant des heures

Respirer un air qui n’existait plus

On peut tout te prendre

Mais pas l’essence de toi-même

L’essence de ton être

Le qui tu es vraiment

Qui peut - au delà de toute les blessures - se reconstruire.

Ne chassons pas le bébé avec l’eau du bain, de l’inné ou de l’acquis qui a fait la bataille

Ne cherchons pas en vain à changer puisque

De la manière dont tu t’es construit.e

Tu ne peux plus changer

Seulement ta manière de réagir

De comprendre, d’organiser

Et ça viendra tout seul.

On peut tout te prendre

S’en va l’appartement, le lieu que tu habitais

Où tu avais installé ton âme jusque dans les moindres recoins

S’en va l’asile docile que tu avais formé avec quelqu’un

S’en vont les êtres chers

Sans que l’on y comprenne rien

T’envoient des étoiles des messages inaudibles

Ou alors spectaculaires

On peut tout te prendre

Tant que l’on ne te prend pas ta santé

On ne t’a rien prit.

Tu peux reconstruire l’appartement, tu peux racheter le frigo et l’aspirateur, tu peux te rhabiller pour l’hiver, tu peux collectionner d’autres souvenirs comme des traces grises sur des papiers blancs et tu peux prendre d’autres photographies

Ecrire de nouveaux livres

Les souvenirs sont dans le coeur, dans la tête et dans l’âme

Tu peux tout chavirer, ils resteront, tu n’oublieras pas

On peut tout te prendre,

Tant que l’on ne t’a pas volé ta santé,

On ne t’a rien volé.

Tant que l’on ne t’a pas volé tes amis, ton père et ta mère, tes frères, ta soeur du bout du monde

Tant que tu peux être entouré d’amour

On ne t’a rien pris.

S’en vont tes croyances par centaine

S’en va ton insouciance par pelletées de 4

S’en va ta raison qui oscille sous le doute

S’en vient la douleur ancrée dans ton plexus solaire

S’en viennent des hallucinations complexes et des comas profonds

S’en viennent ta raison qui vacille et la science de ton esprit qui dégringole

On peut tout te prendre

Mais tant que la maladie ne t’a pas pris la vie, égorgée que tu es par des mains de fous furieux

On ne t’a rien pris.

Tant qu’une ordonnance ne t’a pas condamnée à la plus belle des erreurs médicales

Tant que tu as pu fuir cet homme qui te privait de ta liberté et de ta vie

Tant que tu peux reconstruire ton esprit sous ton corps chaperonné,

On ne t’a rien prit.

Ta liberté est intérieure

Elle est le plus doux des poèmes

Ta liberté est extérieure, tu navigues dans tes choix et il ne se passe rien de grave

Quand ta santé te revient

Là, tu sais, on ne t’a rien pris.

Les plus forts traumas ne prennent pas le dessus 

Les plus grandes résilience se mettent en place

Car il te suffit de vivre.

Avoir un toit au dessus de la tête

Avoir de quoi boire et manger, se vêtir

Un budget minimum pour vivre dignement

Etre bien entouré.e

Voilà le nouvel asile.

Peu de choses sinon la vie peuvent rendre heureux

Peu de choses sinon y passer de bon moments avec les personnes que tu aimes

Ou seul dans ta retraite intérieure

Et quand tu reviens du pays des idoles vaincues

Du pays de la soif et de la peur

De l’angoisse la plus sordide et la plus forte qui soit

Un interstice de vie tel un filet d’eau

Une onde sous le ciel noir

La moindre des étincelles éclaboussée par la vie

C’est ton sourire qui revient.

Tout le matériel ne compte plus

Il reste une seule chose qui compte : être là.

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